ISR & Défense : comment les sociétés de gestion tracent leurs propres lignes
L’inclusion ou non du secteur de la défense dans les portefeuilles ISR suscite aujourd’hui de nombreuses interrogations. Depuis la guerre en Ukraine et le lancement du plan européen ReArm Europe, les États renforcent leurs investissements dans les industries de défense. Certaines sociétés de gestion réévaluent alors leur politique d’exclusion.
Ce sujet peut sembler sensible. Pourtant, au-delà des débats, il s’agit d’une évolution concrète des stratégies de gestion que les CGP gagnent à pouvoir décrypter, pour répondre avec clarté aux questions de leurs clients.
Ce que dit la réglementation : aucune interdiction automatique
Le cadre européen de la finance durable, qu’il s’agisse de la SFDR ou de la future CSRD, n’exclut pas formellement de secteur, y compris la défense. Seules les armes controversées – comme les mines antipersonnel, les armes chimiques ou les munitions à fragmentation – sont exclues par des traités internationaux (Ottawa, Oslo) et reprises dans certains labels comme le label ISR français.
L’armement conventionnel, lui, n’est pas interdit : chaque société de gestion reste libre d’en intégrer ou non, selon ses convictions, ses analyses ESG, et ses engagements vis-à-vis des investisseurs.
Un paysage de gestion qui se diversifie
Face à l’évolution du contexte géopolitique, plusieurs sociétés de gestion font évoluer leurs positions, chacune à sa manière. Voici quelques exemples des approches actuellement en présence :
Triodos IM
Triodos exclut totalement le secteur de la défense, qu’il s’agisse d’armement controversé ou conventionnel. Cette position, fondée sur des principes éthiques de paix et de durabilité, s’applique à tous ses fonds. Elle n’a pas évolué malgré le contexte géopolitique, Triodos privilégiant l’investissement dans la prévention des conflits et les droits humains.
Robeco
Robeco maintient une exclusion stricte des armes controversées dans tous ses fonds. L’armement conventionnel peut être intégré dans les portefeuilles traditionnels, mais reste exclu des stratégies les plus durables. Leur approche vise un équilibre entre rendement, risque et durabilité, tout en s’adaptant aux évolutions géopolitiques.
Ecofi
Ecofi adopte une approche nuancée : exclusion stricte de neuf catégories d’armes controversées, et non-exclusion systématique de l’armement conventionnel ou nucléaire, selon une évaluation ESG approfondie. Sa méthodologie PRISME guide cette analyse, fondée sur la cohérence éthique et non sur une réaction aux seuls événements géopolitiques.
Amplegest
Amplegest continue d’exclure toutes les armes non conventionnelles. Concernant la défense conventionnelle, leur politique a récemment évolué : ces valeurs peuvent désormais être envisagées sous réserve d’une diligence raisonnée selon les critères ESG traditionnels. Le changement s’inscrit dans un contexte de hausse des budgets militaires et d’émergence d’épargne fléchée vers la défense.
Mandarine Gestion
Mandarine opère une distinction claire entre armement controversé (exclu) et conventionnel (éligible au cas par cas). Elle appelle à conjuguer responsabilité fiduciaire, attentes clients et contexte stratégique, tout en rappelant que la défense reste faiblement pondérée dans les indices (moins de 2 % à ce jour, au 30 avril 2025).
DNCA Investments
DNCA défend l’idée que la finance durable est un cadre d’analyse, et non un système d’exclusion morale. Elle rappelle que la réglementation n’exclut aucun secteur a priori, et que la diversification reste un principe fondamental de la gestion d’actifs. Sa gamme couvre toute la hiérarchie SFDR (Articles 6, 8, 9), permettant d’adresser toutes les sensibilités.
BDL Capital Management
BDL critique une vision trop dogmatique de l’ESG. Elle plaide pour un réalisme assumé: selon elle, la finance durable doit intégrer la rentabilité comme condition de sa pérennité, et ne pas exclure des secteurs stratégiques comme la défense. Elle considère cette évolution comme une opportunité de réconciliation entre performance et utilité sociale.
En un coup d’œil : comment les sociétés de gestion abordent-elles le secteur de la défense ?
Avec isrselect, vous pouvez filtrer ces approches selon vos propres critères et construire une allocation adaptée aux préférences de vos clients.
Pour les CGP : expliquer sans arbitrer
Dans ce contexte mouvant, le rôle du CGP n’est pas de juger, mais de traduire. Comprendre les politiques ISR des sociétés de gestion devient un enjeu central de conseil, en particulier sur des sujets sensibles.
« Les attentes des clients évoluent, les positions des gérants aussi. Notre rôle, c’est d’aider les CGP à avoir une lecture claire des politiques ESG et d’exposer les faits clairement pour que leurs clients puissent choisir en conscience. »
- Aymeric Richard, CEO d’isrselect
Ce qu’il faut retenir :
La défense conventionnelle n’est pas interdite, mais intégrée de manière variable selon les stratégies.
Chaque société de gestion fait des choix différents, qu’il convient d’expliciter au client.
L’important n’est pas d’unifier les approches, mais de respecter les préférences de chacun.
isrselect : un outil pour accompagner et mieux conseiller
Face à cette complexité croissante, isrselect vous permet de rester clair, neutre et cohérent dans vos allocations ISR :
Trier les fonds selon vos propres critères d’exclusion : vous pouvez notamment filtrer selon l’exposition à l’armement conventionnel, conformément aux préférences de vos clients.
Comparer objectivement les politiques ISR des sociétés de gestion, y compris leur position sur les secteurs sensibles.
Construire une allocation proportionnée, en ajustant le niveau d’exposition selon la stratégie du client, sans trancher à sa place.
Quelle que soit l’opinion de l’investisseur, l’essentiel est qu’il puisse investir en cohérence avec ses valeurs. C’est tout l’enjeu d’une sélection claire, transparente et assumée.
Demandez votre démo personnalisée et découvrez comment mieux conseiller… même quand le sujet fait débat.
→ Cet article sera enrichi au fil des semaines avec les prises de position d’autres sociétés de gestion, afin de refléter au mieux la diversité des approches ISR sur ce sujet complexe. Les contributions de Triodos IM et Ecofi ont été recueillies directement par isrselect et d’autres entretiens sont en cours.
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Sources : patrimoine24.com, "Robeco - Investir dans la défense en tant qu’investisseur responsable" 20 mars 2025 - patrimoine24.com, "DNCA Investments - Non, la finance durable n’est pas exclusive" 3 avril 2025 - patrimoine24.com, "BDL Capital Management - L’ESG s’intéresse à la Défense: mieux vaut tard que jamais !" 3 avril 2025 - patrimoine24.com, "Amplegest - La défense : secteur « non durable » ou dernier garant de la « durabilité » ?" 30 avril 2025 - patrimoine24.com, "Mandarine Gestion - Défense : la ligne de front bouge aussi côté investisseurs" 30 avril 2025 – isrselect, "Interviews directes Triodos IM et Ecofi", réalisées par isrselect en juin 2025